Droit Social | Sélection de jurisprudence – France | Premier semestre 2024

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  • Cass. soc., 31 janvier 2024, n°22-18.792

La lettre de licenciement n’a pas à préciser la date des faits invoqués.

Un salarié licencié pour faute grave conteste la rupture de son contrat de travail, en se fondant notamment sur l’absence de mention de la date de commission des faits.

La cour d’appel lui donne raison, estimant que de ce fait la lettre de licenciement manquait de précision

L’employeur estime pour sa part avoir été suffisamment précis, puisqu’il énonçait de manière détaillée dans la lettre les motifs justifiant le licenciement, notamment une opposition et une remise en cause des directives de sa hiérarchie, un comportement inadapté dans ses relations de travail ainsi que le non-respect délibéré de la réserve, la loyauté et l’exemplarité inhérentes à son poste.

La Cour de cassation est convaincue par ce raisonnement et retient que, si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, la datation des faits invoqués n’est pas nécessaire. Ce sera en cas de contestation que l’employeur devra rapporter la preuve de toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ces motifs.

  • Cass. soc., 14 février 2024, n°22-23.073

La preuve par images de vidéosurveillance est recevable en justice.

A la suite de la série d’arrêts du 22 décembre 2023 par laquelle la Cour de cassation ouvrait le régime de la preuve en admettant des moyens de preuve illicites ou déloyaux, la chambre sociale de la Cour de cassation se prononce sur la vidéosurveillance.

Un magasin a constaté des écarts non justifiés entre ses ventes et ses stocks. Un contrôle des vidéos sur une caisse a révélé 19 anomalies graves en moins de 2 semaines et a conduit au licenciement pour faute grave de la salariée concernée.

Les juges du fond ont déclaré que la preuve était recevable au motif que la production des données personnelles issues du système de vidéosurveillance était indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur et proportionnée au but poursuivi.

La Cour de cassation valide ce raisonnement et retient que la cour d’appel a mis en balance de manière circonstanciée le droit de la salariée au respect de sa vie privée et le droit de son employeur au bon fonctionnement de l’entreprise, en tenant compte du but légitime qui était poursuivi par l’entreprise, à savoir le droit de veiller à la protection de ses biens.

  • Cass. soc., 13 mars 2024, n°22-20.970

Le harcèlement sexuel ne peut justifier la suppression d’un bonus.

Un salarié travaillant pour un établissement de crédit est licencié pour faute grave pour harcèlement sexuel du fait notamment de l’envoi de messages à connotation sexuelle à plusieurs de ses subordonnées. Il conteste le bien-fondé de son licenciement et demande également le paiement de rémunérations variables différées, que son employeur a refusé de lui verser en raison desdits agissements.

L’employeur a maintenu que le harcèlement sexuel constitue un défaut de respect des exigences d’honorabilité du Code monétaire et financier (art. L511-84) et un comportement professionnel à risque, qui justifiait la privation de rémunérations variables différées.

La Cour de cassation ne l’entend pas de cette façon. Elle retient que les règles d’honorabilité auxquelles le Code monétaire et financier fait référence, et qui autorisent les établissements de crédit à ne pas verser une rémunération variable, correspondent à des règles professionnelles en lien direct et étroit avec l’activité professionnelle d’investissement à risques. Elle estime que le harcèlement sexuel est étranger à cette activité et en conclut que l’employeur ne pouvait supprimer la rémunération variable du salarié sur ce fondement.

  • Cass. soc., 13 mars 2024, n°22-22.032

Modification du bulletin de paie : l’accord du salarié est requis.

Une salariée licenciée sollicite un rappel de salaires fondé sur une modification unilatérale de son contrat par l’employeur. Pendant 13 ans, ses bulletins de paie ne contenaient qu’une seule ligne relative à son salaire mensuel, puis ils ont été modifiés pour inclure deux lignes distinctes, l’une mentionnant le salaire mensuel, l’autre mentionnant le temps de pause, sans que le taux horaire auquel ces temps étaient rémunérés ne soient modifiés.

Pour la cour d’appel puisque l’employeur rémunérait toujours la salariée pour le même nombre d’heures, il n’y avait aucune modification unilatérale du contrat de travail.

La salariée conteste cet arrêt, et la Cour de cassation lui donne raison. La Cour rappelle que la durée contractuelle de travail constitue un élément du contrat de travail ne pouvant être modifié sans l’accord du salarié. Même si la rémunération est maintenue l’employeur ne pouvait donc pas modifier unilatéralement la présentation du bulletin de paie, en affichant sur deux lignes distinctes les heures de travail et les heures de pause rémunérées au même taux horaire.

  • Cass. soc., 19 juin 2024, n°23-10.817

Rupture conventionnelle : la dissimulation d’un projet d’activité concurrente entraîne la nullité de la convention.

Un salarié sollicite une rupture conventionnelle en se fondant sur une lassitude à son poste, une absence d’évolution et une volonté de suivre une formation. Une convention de rupture est alors signée avec l’employeur.

La cour d’appel prononce la nullité de cette convention pour vice du consentement de l’employeur. En effet, le salarié avait dissimulé un projet bien avancé de création d’une activité concurrente à celle de son employeur, initié dans le même secteur d’activité et auquel étaient associés deux anciens salariés de l’entreprise.

Le salarié conteste cet arrêt, en avançant qu’aucune réticence dolosive ne pouvait lui être imputée puisqu’aucune obligation d’information de son cocontractant ne pesait sur lui. Il estimait également que cette solution portait atteinte au principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle.

La Cour de cassation confirme toutefois l’arrêt d’appel et estime qu’en dissimulant ce projet d’activité concurrente, le salarié a commis une réticence dolosive, puisque cet élément était déterminant du consentement de l’employeur, et ce même si aucune obligation d’information ne pesait sur le salarié. Le consentement de l’employeur a ainsi été vicié. La convention de rupture est donc annulée et la rupture produit les effets d’une démission.

DISCLAIMER: Because of the generality of this update, the information provided herein may not be applicable in all situations and should not be acted upon without specific legal advice based on particular situations.

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